Arête Mettrier : alpinisme et parapente aux Dômes de Miage
Belles conditions à l’arête Mettrier. Une ligne esthétique qui nous a emmené au sommet des dômes de Miage avant de décoller en parapente.
RESUME :
Accès : Saint Gervais, La Gruvaz
Itinéraire : Le topo camptocamp. 2000m D+ depuis les chalets de Miage. Il faut rajouter 400m en partant du parking de la Gruvaz.
Atterrissage : Immense aux chalets de Miage. Sinon atterrissage possible en vallée. Il faudra remonter un peu jusqu’au parking ensuite.
Décollage : Quasiment toutes les orientations sont possible. Il suffit d’être créatif! Côté sud, il faut respecter les 300m sol de la réserve des contamines.
Intérêt : Course beaucoup plus ludique que la voie normale mais pas très technique quand les conditions sont bonnes.
En pointillés rouge, l’itinéraire après avoir quitté le chemin qui monte à Plan Glacier depuis les pâturages de miage. En jaune, nos deux trajectoires de vol. Flèches vertes, des possibilités de décollage.
Récit d’Avelaine S.
Belle arête Mettrier, tant convoitée ! Non pas forcément par moi directement mais surtout par Thibault. Je n’ambitionnais pas de m’inclure dans ce projet, non pas par envie mais par peur de ne pas être à la hauteur au vu de la longueur et du dénivelé de la course. Mais c’était sans compter la possible descente en parapente depuis le sommet des Dômes de Miage…
Une longue approche au réveil
Vendredi 29 mai, check météo : le créneau est là ! Beau temps, belle neige et surtout pas de vent. C’est lundi 1er juin et pas un autre jour où il faudra répondre présent.
Réveil 2h40, on s’habille ! Direction Servoz pour récupérer Matt et Antoine qui partageront l’ascension avec nous. Puis direction le parking de la Gruvaz où Pierre et Arnaud (des collègues de travail) nous récupèrent en 4×4. Je les remercie encore pour cette bien bonne proposition faite 2 jours avant. 400 mètres de dénivelé positif avalés en une vingtaine de minutes. Mes pieds leur rendent grâce.
Arrivés aux chalets de Miages, nous récupérons nos sacs et prenons la direction du sommet du jour. Nous voilà doublés assez rapidement par Pierre et Arnaud qui sont partisans du « très » light sur cette approche… C’est avec leurs petits collants saillants et chaussures de trail que leurs loupiottes s’éloignent peu à peu de nous pour nous laisser dans ce chemin de montée interminable jusqu’au refuge de Plan Glacier. J’ai eu la bonne idée de ne pas prendre mes bâtons ! Au bout de 30 minutes, je sens mes jambes s’alourdir. Je m’en veux car d’habitude je les prends toujours. Tant pis, j’honore le célèbre adage « Quand on n’a pas de tête, on a des jambes ». Arrivés au refuge de Plan Glacier après 2h de marche, je sens déjà 2 ampoules qui prennent vie sur mes talons. Cela fait quelques mois que je n’ai pas enfilé mes grosses, ça se ressent bien… Il ne reste plus que 1000 mètres de dénivelé à parcourir, tout va bien. On mange un bout et on repart. Crux de la course : descente de la moraine pour atteindre le glacier de Miage. On met les crampons et le baudrier afin d’être rapide dans le déplacement (moraine, pente de neige, …). Après avoir traversé le glacier, nous arrivons au pied du couloir menant à l’arête Mettrier. C’est bien plus raide, le rythme se réduit. Le passage de la rimaye se fait sans mal.
Passage de la rimaye en bas du couloir
Ascension de l’arête Mettrier
Le couloir débouche sur l’arête à proprement parler. Petite pause, on profite des rayons du soleil qui nous atteignent enfin. Puis c’est parti pour une longue montée ! Nous enchaînons passages rocheux (rares), pentes de neiges plus ou moins raides et plus ou moins effilées. Cette arête a le mérite d’être efficace, elle ne fait que monter. Le regel est excellent et les nombreuses traces réalisées les jours précédents ont laissé de belles marches, réduisant l’effort à fournir pour se hisser au sommet.
Petite pause au sommet du couloir, avant d’attaquer l’arête à proprement parler.
Partie rocher, plutôt agréable
A gauche, on remarque l’aiguille de Bionnassay (futur projet, je l’espère). Au dessus du col infranchissable se dessine le Mont-Blanc à mesure que nous nous élevons.
De gauche à droite : Bionassay, dôme du Goûter et le Mont-Blanc
Sur notre droite, on peut voir les remarquables pentes de neiges de la face nord, ponctuées de ressauts rocheux. Un peu plus haut, le col de Miages nous fait de l’œil… Sur cette arête esthétique, la montée est franche et régulière.
L’arête Mettrier avec le col de Miages en haut à droite
L’avantage avec cette course c’est qu’à partir du moment où le jour se lève, l’objectif à atteindre reste visible. On le voit se rapprocher doucement à mesure que l’on évolue.
C’est sympa de monter mais il s’agirait de s’alimenter pour relancer la machine. Pourtant, impossible de manger quoi que ce soit. Je tente un bout de barre aux céréales mais je le rejette instantanément… J’ai l’estomac complètement bloqué. Il n’y a que l’eau qui passe mais à cet instant présent, j’ai besoin de solide. Hypoglycémie quand tu nous tiens… Sur les derniers mètres de dénivelé, je me sens faible. Je suis fatiguée, j’ai faim, je vacille en marchant. Je suis rassurée d’être encordée à Thibault car je ne me sens pas sereine sur mes appuis.
Summit !
Nous voilà arrivés au col de Miages, non sans peine. Je suis contente mais honnêtement, je suis déphasée. Je sais que dans quelques minutes, je vais avoir besoin de mes pleines capacités pour décoller et puiser dans mes dernières ressources.
Le décollage au col, côté face nord semble favorable. C’est une belle pente. Mais Matt et Antoine arrivés une trentaine de minutes avant nous, nous proposent de décoller du sommet ou du moins du deuxième dôme. Il ne reste que 50 mètres de dénivelé… J’accepte.
Arrivés au deuxième dôme, nous jouissons d’une vue splendide sur Bionnassay et le Mont-Blanc. Nous distinguons en contrebas les chalets de Miage où nous étions quelques heures plus tôt. Ça fait quand même une belle bambée !
Vue sur le glacier de Tré la tête depuis le col de Miage
La descente des dômes de Miage en parapente !
Après s’être extasiés face à ce panorama, il est temps de décider où l’on va déplier nos voiles et dans quel sens nous allons décoller. La direction du vent est opposée à la prévision faite la veille. Nous ferons avec. Nous voyons Arnaud au sommet avec sa voile. Il nous explique qu’il n’a pas réussi à décoller un peu plus loin sur l’arête. Il réussira à décoller sans problème et rejoindre Pierre déjà en bas !
A mon tour ! Je me place sur un endroit qui ne m’inspire pas mais Thibault m’assure que ce spot est bien. J’essaie à plusieurs reprises de décoller : dos voile/face voile. J’alterne les techniques mais rien n’y fait. Le vent n’est pas très régulier. Ayant la face nord à quelques mètres de mes pieds, Thibault se place entre elle et moi afin d’affaler ma voile si je viens à me faire tracter. C’est rassurant mais malgré tout, ça ne sera pas ici que je décollerai !
Je décide d’exploiter un spot repéré à la montée quelques mètres en contrebas. Je fais un unique face voile qui me permettra de rejoindre les airs ! Je décolle donc du côté du glacier de Tré la Tête. C’est sublime ! Je survole les crevasses et embrasse du regard les montagnes qui m’entourent. Je suis absorbée et ne sais plus où regarder face à ce noble décor. Je survole l’Aiguille de la Bérangère d’où je redescendais quelques années plus tôt après avoir réalisé la traversée des dômes par la voie normale avec Thibault. J’ai beaucoup apprécié passer à proximité et me remémorer ces souvenirs.
Il est temps pour moi de rejoindre la vertigineuse face nord. J’observe les reliefs glaçants qui s’y rattachent. C’est impressionnant ! Je survole le bas de l’arête Mettrier où nous étions quelques heures auparavant. Je surveille constamment ma hauteur sol pour être certaine de ne jamais être trop basse pour atteindre l’atterrissage. Avant de décoller, nous avons fait le choix de nous poser aux chalets de Miages par soucis d’esthétisme. Cette décision nous laisse donc le temps de profiter du paysage car elle nous accorde plus de hauteur pour moins de distance. Dernier effort de concentration pour l’atterrissage. Face à moi, un champ immense, pas de grande pression ! Je vois Matt arriver peu après moi. Antoine décide d’aller se poser plus bas dans la vallée. On se retrouvera 1h plus tard au parking. Thibault, qui a décollé de l’autre côté pour pouvoir survoler l’itinéraire de montée (vidéo), se pose en dernier.
Saurez-vous retrouver le parapente sur cette photo ?
Thibault qui survole l’arête Mettrier avec sa skin 3P
Notre belle piste d’atterrissage, les chalets de Miage
Thibault qui pose pieds à terre aux côtés de Matthieu
Heureux, fatigués… mais surtout satisfaits de notre projet. On replie les voiles et nous redescendons les 500 mètres de dénivelé effectués le matin même en 4×4. Ça descend mais pour ma part, je couine un peu. Mes genoux dérouillent et j’ai mal aux pieds… Comment j’aurais fait sans parapente ?…
Parking ! Déverrouillage de voiture, posage de sac et changement de chaussures. Quel bonheur de pouvoir laisser ses pieds à l’air frais après cette belle et rude matinée…
Bon vol !