Ascension de la Dent Blanche par l’arête sud (voie normale). Arête rocheuse esthétique avec vue panoramique sur les 4000 du Valais et le Cervin. Descente en parapente.

RESUME :

Accès : Suisse, Val d’Hérens, Ferpècle. Plusieurs parkings au fond de la vallée
Topo : Topo camptocamp
D+ : 1700 mètres le premier jour et 800 mètres le lendemain
Atterrissage : Champ en bordure de la rivière. Attention, la brise peut descendre des glaciers (catabatique) même l’après-midi.
Décollage : Nord-Ouest à Sud-Ouest en-dessous de la cabane de la Dent Blanche
Intérêt : Course d’arête avec panorama sur les 4000 du Valais. Les passages grimpants sont en beau rocher compact.

Vidéo en fin d’article

Carte topographique de la dent blanche avec décollage et atterrissages en parapente

Récit d’Avelaine S.

Montée au refuge de la Dent Blanche

Ce week-end, notre désir d’aventure s’oriente sur la Dent Blanche en Suisse. Sommet que nous convoitons depuis quelque temps. L’an passé, nous n’avions pas trouvé de créneau pour combiner l’ascension avec une descente en parapente. Mais ce coup-ci, cela semble bel et bien se dessiner car Thibault à terminé son vol bivouac plus tôt que prévu et le prévisions météo du week end sont bonnes. Nous préparons donc nos affaires le vendredi soir sans plus attendre.

Deux heures nous séparent du val d’Hérens au fond duquel se dresse notre montagne. Nous partons à 7h00 de Chamonix pour rejoindre Ferpècle, départ de l’approche, en milieu de matinée. Vu les conditions météorologiques, Thibault est tenté d’essayer d’atteindre la cabane de la Dent Blanche en parapente, avec l’aide des thermiques. Le refuge se situe 1700 mètres au-dessus de nous, cette possibilité est donc alléchante… Finalement, nous choisissons la prudence en montant à pieds. La marche d’approche pour atteindre le refuge débute au fond de la vallée d’Hérens, très sauvage. Le chemin est fort agréable et nous permet de contempler les paysages alentours. Nous faisons une halte pique-nique à mi-chemin, à proximité d’un petit lac de fonte à l’eau turquoise.

Photo 1 : Le vallon de Ferpècle
Photo 2 : Pause pique-nique au bord d’un lac de fonte

Cette pause est bien appréciable. Nous en profitons pour laisser nos petons à l’air! Nous faisons l’approche en grosses chaussures d’alpinisme (et pantalon d’alpi en plus pour moi)… On a chaud ! Après s’être rassasiés face à la mythique Dent Blanche, nous reprenons notre chemin. Début d’après-midi, digestion et chaleur ne font pas bon ménage. Il est franchement difficile de se mouvoir… D’autant que l’itinéraire se raidit et nous contraint à devoir poser les mains. Puis l’altitude s’ajoute à cela. Le refuge se trouve à 3500 mètres. Mais nous voyons notre affaire du lendemain se rapprocher peu à peu de nous… C’est excitant !

Nous atteignons le refuge en début d’après midi.

Arrivée refuge dent blanche

Arrivée à la cabane de la Dent Blanche

On pousse la porte de la cabane. A l’intérieur, Marcel, le gardien, est en cuisine, affairé à émincer le poulet et couper les légumes pour le repas du soir. Son accueil est aussi chaleureux que son refuge. On se croirait dans une maison de poupée, c’est cosy.

Dortoir du refuge de la dent blanche

Ambiance cosy à l’intérieur du refuge

Nous rangeons nos affaires, nous changeons et partons profiter de la vue sur la terrasse. Le panorama est grandiose ! Nous distinguons l’aiguille de la Tsa, les sommets des bouquetins et la Dent d’Hérens, très blanche… Nous rencontrons un guide suisse, Sébastien, très sympathique. C’est lui qui nous fait l’exposé du paysage avec passion. Il nous explique d’ailleurs que dans les années 1900, un cartographe suisse avait confondu la Dent Blanche et la Dent d’Hérens dessinant ainsi une carte erronée. Depuis la véritable Dent d’Hérens se nomme la Dent Blanche et vice versa… Ce qui explique le fait que la Dent d’Hérens soit aussi blanche !

paysages depuis le refuge de la dent blanche

Vue depuis le refuge

Après cette agréable moment, nous décidons d’aller nous reposer en attendant le dîner. Vers 17h45, nous descendons à notre table en attendant le dîner servi à 18h30. Nous jouons à des jeux de sociétés : cartes ou mémento (le jeu FAVORI de Thibault…). Des vitres sont installées sur les tables pour respecter la distanciation sociale entre les groupes. Ca n’est pas très pratique pour faire connaissance avec nos voisins… Tant pis, je me contenterai de parler à Thibault 🙂 Viens l’heure de prendre des forces ! Au menu pour commencer, soupe du chef… Oh dieu, qu’elle est bonne! Epicée, voire très épicée mais tout le monde en redemande et Marcel est fier d’en resservir à grandes louches à ses convives. Le plat principal se compose de nouilles aux œufs et légumes avec quelques morceaux de poulet… Une fois de plus, c’est délicieux ! Et Marcel repasse pour un deuxième service. Manger aussi bien à 3500 mètres d’altitude est une chance et mérite d’être raconté. En dessert, c’est une mousse au chocolat qui nous titille les papilles. Nous sommes rassasiés et comment ! Viens ensuite, le brief de Marcel : météo, conditions, … Tous les voyants sont au vert et nous nous sentons sereins. Il est l’heure de rejoindre notre dortoir où mystérieusement, je passerai une super nuit.

Opération  » Dent Blanche « 

Réveil 4h20, petit-déjeuner 4h30, départ 4h53. En avant ! Les départs de course d’alpinisme ne sont jamais agréables… Et puis celui-ci démarre rudement avec une montée sèche dans les dalles qui surplombent le refuge. Le cœur s’emballe et ça ne fait que quelques minutes que nous sommes partis. Ce n’est pas évident de s’orienter à la frontale malgré quelques cordées devant nous. Il fait nuit noire ! Après cette partie rocheuse, nous voilà sur la partie glaciaire. Nous nous encordons et chaussons les crampons. Il y a une petite montée raide mi neige, mi glace. Je ne suis pas forcément à l’aise (la glace et moi ça fait 10…) mais la sérénité de Thibault pèse pour deux. Nous atteignons le plateau assez rapidement. Ici nichent quelques belles crevasses dont Marcel nous avait dit de nous méfier. Effectivement elles sont bien présentes ces coquines. Nous prenons pieds à nouveau sur du rocher et remontons une arête en marchant et posant quelques fois les mains. Puis nous repassons à nouveau sur une partie glaciaire que l’on franchit assez rapidement.  Ça y est, nous sommes au pied de la fameuse arête sud de la Dent Blanche. Derrière nous l’aube pointe son nez. Le légendaire Cervin se découpe dans un ciel dont les teintes bleu nuit laissent place à des nuances violacées puis oranges. L’ombre massive qu’il était jusqu’alors se peint de détails à vue d’œil. La clarté du jour naissant donne du reliefs aux glaciers et pentes de neige. Le massif du Mont Rose prend forme petit à petit. C’est splendide ! On en prend plein les yeux.

lever de soleil sur le cervin

Lever du jour et vue sur le Cervin

Nous déposons nos crampons et piolets au pied de l’arête. Nous les récupérerons une fois descendus. Nous sommes plusieurs cordées sur l’arête ce jour-là. Nous distinguons en contre bas de la face Ouest des frontales. Certains ont bivouaqué plus bas que la cabane ou bien empruntent d’autres voies. Le jour gagne encore un peu plus de terrain sur la pénombre. C’est une chance incroyable d’évoluer dans un environnement pareil. Mais ça, on en est bien conscients 🙂 

Progression sur l’arête dans un décor exceptionnel

Vue depuis l'arête de la dent blanche. Cervin et dent d'herens

Cervin et Dent d’Hérens

Nous devons malgré tout rester concentrés et regarder où nous mettons nos pieds. Le démarrage de l’arête est facile, l’itinéraire semble évident. Nous crapahutons un moment. Nous arrivons à une section un peu plus raide où les cordées qui étaient devant ralentissent un peu. Nous les dépassons en décidant d’évoluer corde tendue et non pas en tirant des longueurs. Ce qui nous fait gagner un temps précieux. La grimpe est super, pas difficile avec des prises franches. A un moment, nous nous écartons un peu de l’itinéraire en prenant une vire face Ouest, je prends froid… Le rocher est moins bon, nous ne sommes pas sûrs de notre coup… J’enfile mes gants de ski car mes mains sont gelées, pas évident de grimper avec mais ça le fait. Puis nous rejoignons le fil de l’arête. Nous évoluons toujours corde tendue en posant un ou deux coinceurs par-ci, par-là. Le milieu de la course est plus grimpant et du coup le plus intéressant techniquement. Dans cette section le rocher est de très bonne qualité. Dalle fissurée, cheminement sur le fil puis un dernier mur.

Le soleil est sorti à l’horizon. Une lumière rasante éclaire tous les sommets du Valais et du Mont Rose. En regardant à l’Ouest, on distingue aussi le massif du Mont Blanc. La lumière change vite et lorsque l’on revient sur le fil, après chaque petit détour, le paysage semble s’être transformé. C’est un prétexte pour prendre à chaque fois quelques secondes pour une photo. Devant nous l’arête se couche et le terrain devient plus facile. On crapahute à nouveau. Nous approchons du sommet situé à 4 358m. Les derniers pas sont difficiles physiquement… Fatigue, altitude et technicité du terrain. Je me mets un petit combat mental de quelques minutes. Nous arrivons enfin à cette belle croix où nous rejoignons Sébastien, le guide suisse rencontré la veille et sa cliente Martine. 

Sommet dent blanche

Sommet

Nous nous félicitions mutuellement ! Nous prenons le temps de regarder le panorama à 360° qui nous entoure. On peut observer les Lyskamm dont nous avons fait la traversée au début de l’été ainsi que le Weissmies, un autre 4000m, dont nous avions pu décoller en parapente l’an dernier. Puis on se projette vers de futures courses d’alpinisme : Cervin, Weisshorn, Zinalrothorn… ? Ces sommets ont des noms et des formes qui nous laissent rêveurs. Debout sur « notre » sommet, on agrandit notre connaissance de l’espace, on précise la représentation que l’on se fait de ce terrain de jeu que sont les Alpes, on apprend des noms qui nous raconteront une histoire une fois rentrés à la maison et qui nourrirront nos rêves. On aurait envie de rester là-haut des heures durant mais notre journée est loin d’être terminée. 

Photo 1 : Le Zinalrothorn
Photo 2 : Le massif du Mont Rose

Nous prenons obligatoirement quelques photos souvenirs. Il fait un temps magnifique, un ciel radieux et pas de vent. Un vrai bonheur ! Nous redescendons tranquillement. Sébastien qui connaît par cœur le terrain file devant… Heureusement, il nous a partagé une de ses « astuces » qui nous fera gagner du temps en empruntant une vire, « Follow the guide ». Nous désescaladons un maximum pour gagner du temps. 

désescalade dent blanche

Thibault en désescalade

Nous ne prenons pas de pause jusqu’à l’endroit où nous récupérons nos affaires, au pied de l’arête. C’est bien éprouvant. La particularité de cette course est que l’on met autant de temps à la montée qu’à la descente. En regardant en arrière, nous voyons un monstre bouchon aux premiers rappels de la descente plusieurs centaines de mètres au-dessus de nous… L’efficacité a du bon, j’avoue, j’avoue. Nous terminons la descente et regagnons le refuge. Le temps est toujours au beau fixe. Peu après avoir récupéré nos affaires au refuge, nous nous habillons pour le vol (pour ma part, je me vêtis tel un explorateur du cercle polaire) et descendons en contre bas pour décoller. Nous croisons Sébastien et sa cliente qui descendent et nous souhaitent un bon vol ! Nous leur souhaitons également une bonne et longue descente (hihihi). Je ne troquerai pas ma place pour un sous. Nous nous préparons à décoller. Il n’y a toujours pas un brin d’air… Nous sommes à 3500m d’altitude, il va falloir cavaler, d’autant que le décollage est assez plat. C’est parti, on court, on court, on continue de courir… Et on se fait prendre en charge, j’ai l’impression qu’on va retoucheeeeeer… et non ! Ouf ! Ça y est, nous avons rejoint les airs. 

parapente dent blanche

Heureux d’être sous le parapente

Un vol en parapente qui tombe à l’eau

Ce sont 1800m de vol qui nous attendent. Nous visons le Mont Miné, la montagne en face de nous afin de raccrocher pour essayer de s’élever ensuite. Nous jouons quelques instants sur ce relief en aller-retour. Cela nous permet de voir le paysage autrement et de s’approcher des glaciers. Nous sommes à cheval entre le glacier du Mont Miné et le glacier de Ferpècle. L’un est étroit et l’autre est bien large, à chacun sa singularité. Nous dominons la vallée malgré quelques sommets alentours bien plus hauts que nous. Nous visualisons, en format carte postale, notre ascension du parking au sommet. C’est une belle manière de conclure. 

parapente dent blanche

L’itinéraire dans son intégralité. L’arête est celle qui descend à droite du sommet.

Nous nous dirigeons par la suite vers la zone d’atterrissage qui n’est rien d’autre que des bancs de sable au milieu des méandres d’une rivière. Bon ok, ça c’est nous qui l’avons bien choisi. Nous aurions pu préférer le petit champs en rive droite du torrent… 

parapente dent blanche

Il faut choisir son banc de sable pour se poser

On se dit « Allez, un petit atterrissage fun pour terminer ! ». Thibault prépare son approche (bizarrement…). Au moment d’atterrir, je vois l’eau se rapprocher dangereusement de nos pieds… Et PLOUF, dans l’eau ! Plutôt original comme retour à la réalité. Nous nous sommes fait avoir par l’air frais qui descendait des glaciers et qui ne l’emportait pas sur la brise de vallée malgré l’heure avancée.

Atterrissage parapente depuis dent blanche

Atterrissage les fesses dans l’eau

Nous explosons de rire avec Thibault. On a fait fort… La voile s’affale sur le banc de sable situé à 50 cm de notre cratère aquatique. Nous nous rapprochons d’elle pour la récupérer mais ce que nous n’avions pas anticipé, c’est qu’une partie de la voile était en train de se faire happer par l’eau… Non pas que le ruisseau soit profond mais le courant y est quand même présent. D’un coup, nous sentons la voile nous tracter… On jette un coup d’œil et on voit qu’elle s’engouffre rapidement dans l’eau. Elle nous tire vers elle. Nous sommes contraints de nous asseoir, d’ancrer nos pieds dans le sable pour la contrer. Thibault appelle quelqu’un pour que l’on vienne nous donner un coup de main… Un homme vient rapidement vers nous et commence à sortir la voile de l’eau. C’est très lourd… Et nous n’avons pourtant qu’une voile de biplace monosurface (aucuns caissons). Nous retirons nos deux mousquetons du même côté pour que la voile se mette dans le sens du courant et n’écope plus. Nous sommes presque libérés ! Nous allons aider notre camarade à finir de retirer la voile de l’eau. On est couvert de sable et tout mouillés… Mais bon, ce n’est pas le plus important. On est un peu grincheux, surtout Thibault… On essaye de faire sécher nos 31m2 de tissus mais ils sont plein de sable, d’eau et de cailloux. Situation complexe ! … Nous décidons de la mettre en boule, on s’en occupera plus tard. Le second problème auquel nous devons faire face : traverser les rivières… Ce n’est pas très profond mais l’eau est glaciale et on ne peut pas voir la profondeur du lit. Nous analysons plusieurs combinaisons de traversées, aucune ne semble être mieux qu’une autre. A la fin, on finira par prendre tout droit. On en a marre. On a chaud, faim et on est fatigués ! Petit ascenseur émotionnel. Pour atteindre le parking où stationne notre voiture, c’est clairement le chemin de croix. Il doit rester 2 ou 3km de marche, ce n’est rien mais ça nous semble interminable. Après une bonne dizaine de minutes à marcher (à plat fort heureusement) en portant la voile en bouchon, nous voilà à la voiture. Aventure terminée ! Malgré quelques péripéties en fin de course, qui, comme je dirais, « remplissent la boîte à souvenirs », ce fut une superbe aventure. La grimpe, le refuge, le vol, le panorama, les rencontres…Tout était aligné ces deux jours.

Bon vol !

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